Opéra « Maria de Buenos Aires »
L’unique opéra d’Astor Piazzolla et du poète Horacio Ferrer, intitulé « Maria de Buenos Aires », créé en Argentine en 1968, est une œuvre musicale et poétique qui conte sous une forme allégorique la vie, la mort et la renaissance de Maria, une chanteuse de cabaret populaire.
Piazzola, avec générosité et virtuosité y décline sous forme de romances, de chansons, de clins d’œil à la musique traditionnelle ou jazzy un hommage sensuel et novateur au tango. Horacio Ferrer y ajoute avec malice et impertinence un livret érotique et surréaliste. C’est dire que l’on attendait beaucoup de cette création de l’Opéra de Lyon, coproduite en compagnie des Nuits de Fourvière.
Force est de constater que la représentation de cet objet lyrique rare est assez décevante.
S’il n’y a rien à reprocher à la direction musicale de Valentina Pellegi, pleine de sensibilité et d’humour, au talent rigoureux et raffiné des musiciens tango de l’Ensemble Negracha et de l’Opéra de Lyon et aux interprétations vibrantes et subtiles de la mezzo-soprano Wallis Giunta (Maria/L’Ombre de Maria) et du ténor Luis Alejandro Orozco (Le Duende), les choix du metteur en scène et scénographe Yaron Lifschitz et de la Compagnie Circa sont peu convaincants.
L’omniprésence de dix acrobates -certes techniquement irréprochables- perturbe à l’excès l’écoute de la musique et l’attention aux textes en espagnol projetés en traduction simultanée. L’agitation quasi permanente des corps dilue les émotions à tel point qu’on se surprend souvent à fermer les yeux pour rester au cœur de la musique et s’accrocher aux rêves et aux cauchemars qu’elle suscite.
Comme l’écrit effrontément Horacio Ferrer à propos de Dieu, je n’étais « ni ivre ni en colère » pendant le spectacle, mais cette mise en scène gymnique de « Maria de Buenos Aires » m’a franchement frustré.
L’hybridité de cette création (opéra+danse+cirque+vidéo), option très en vogue ces dernières années, atteint parfois ses limites.
Michel Dieuaide
Opéra de Lyon
Représentations, les 18, 19, 21, 22 et 23 janvier 2022